Le Roi Lion : chef-d’œuvre Disney le plus nauséabond depuis les années 30
Attendez une petite minute avant de me jeter dans la boîte à bobos (non ! pas la boîte à bobos !) pour ce titre légèrement trollesque. Et permettez-moi en préambule d’appuyer un point : le Roi Lion est bel et bien un chef-d’œuvre. Peut-être même l’apothéose d’une période de Disney, tant il a été suivi par des œuvres plus bancales, jusqu’en gros au renouveau actuel avec l’arrivée de John Lasseter à la direction de la section animation, qui se ressent dans Raiponce ou La Reine des Neiges.
Pour s’en convaincre, il suffirait de voir à quel point il a marqué les esprits et la culture populaire. Mais on peut aussi lister quelques raisons pour lesquelles le Roi Lion n’est pas n’importe quel Disney.
« Sous les diamants des étoiles / Quel magique univers / Mais dans cette romantique atmosphère / Ça sent mauvais dans l’aaaair ! »
On peut d’abord saluer le soin apporté à toute la diversité d’animaux représentés, autant dans leur animation que dans leurs émotions, le tout dans un cahier des charges visuel bluffant de cohérence. Ce même soin apporté à des environnements tout aussi riches et inspirés, de la flamboyante savane au territoire mordoresque des hyènes, en passant par la jungle ruisselante de vie. Le tout bénéficiant d’expérimentations visuelles aussi folles que les couleurs et la scénographie de Je Voudrais Déjà Être Roi ou Soyez Prêtes. Il y a une puissance, une majesté qui se dégagent des images et des personnages, imprimés au fer rouge dans nos esprits. Autant que ses passages chantées, tous catapultés sans exception dans le registre de l’inoubliable.
Allez, je sais que vous chantez devant votre écran, avouez.
On pourrait railler le fait que le film est un indubitable plagiat du Roi Léo d’Osamu Tezuka (au point que Matthew Broderick, qui double Simba et connaissait l’original, croyait avoir été embauché pour un remake) mais il faut être sacrément aveugle pour ne pas voir le boulot effectué par le studio d’animation.
Au niveau narration, nous sommes également devant un exemple particulièrement pur de l’efficacité de Disney, machine à raconter les histoires rodée à l’extrême, qui maîtrise à la perfection ses codes et ses effets. Le scénario se déroule sans perte de rythme, totalement servi par l’image et un dosage alchimique humour / action / émotion / suspense. Certes il s’agit des grosses ficelles narratives que le géant du divertissement a contribué à imposer, mais elles n’en sont pas moins d’une efficacité redoutable, et elles trouvent un genre de quintessence dans ce Roi Lion.
Quant à son développement des thématiques, le film se pose en bon héritier des contes de fées sauce Disney. Mais c’est aussi là qu’il sent très légèrement du derche.
« Si tu confonds la monarchie avec la tyrannie / Vive la République / Adieu l’Afrique / Je ferme la boutique »
Les films Disney ont toujours soulevé des critiques quant à leurs valeurs souvent conservatrices et manichéennes, et ce depuis son premier long en 1936, avec sa Blanche Neige passive qui fait le ménage en attendant le prince. Critiques légitimes tant ce rouleau-compresseur de l’imaginaire planétaire a nourri la vision du monde de plusieurs générations, prenant le relais des contes dont il s’est souvent servi. Après, si vous pensez que des allégories destinées aux enfants n’ont aucun impact culturel et idéologique, au prétexte que bof allez meuh non c’est juste un dessin animé t’es chiant, je vous conseille de… Non attendez, sérieusement, vous pensez ça ?
Et c’est maintenant que je dois vous expliquer la deuxième partie du titre en revenant – à contrecœur, croyez-moi – sur un fond marécageux qui ne l’empêche pas d’être un de mes Disney préférés.
Haters gonna hate.
Évacuons tout de suite la facilité qui consiste à dire que Le Roi Lion fait l’apologie de la monarchie. En effet, la représentation d’un beau royaume suit une logique de contes instaurée bien avant nos chères démocraties modernes et n’est d’ailleurs normalement pas là pour légitimer ce pouvoir politique. La plupart du temps, le bon roi est plus une figure de père que de monarque, la reine pour la mère, la princesse le public (car chaque petite fille est une princesse, toussa toussa) et le prince l’amour qui lui est destiné.
Et pour le coup, Le Roi Lion réutilise à merveille ce schéma d’éducation, en montrant le parcours initiatique et le passage à l’âge adulte d’un petit garçon qui devient à son tour le père. Il apprend l’amitié, l’amour, la perte de l’innocence et le sens des responsabilités. Mais surtout, Le Roi Lion a appris avec brio le deuil à des millions d’enfants, dans toute sa rudesse, sa culpabilité et ses maintes étapes de dépassement, en se payant la mort la plus marquante de l’histoire de Disney depuis la mère de Bambi.
Malheureusement, là où le bât blesse, c’est que Le Roi Lion s’engage sur la thématique de l’organisation sociale et du pouvoir politique. Certes cette histoire de cycle de la vie peut aussi servir à expliquer aux enfants le fonctionnement de l’équilibre naturel mais au-delà de cela c’est bien une société qu’il décrit.
« Tu la connais. Elle te connaît. Elle essaie de le bouffer. J’EXIGE UNE EXPLICATION ! »
Enfant, j’avais une vision très positive de Mufasa, notamment parce que j’ai beaucoup pleuré sa mort et surtout parce que Disney est très balèze : le personnage est CONÇU pour hypnotiser les enfants. Il est fort, il se laisse pas faire, c’est le chef, il a l’air sage et il fait pas chier avec des trucs de gonzesses, genre la toilette. En grandissant, j’ai du mal à le voir autrement qu’en bon papa ricain viril et bouffi d’importance, qui joue au baseball avec son fils et qui l’emmène à la chasse. J’ai du mal à dépasser le fait qu’il est prétentieux, sexiste, violent, sentencieux et stupide (il est clairement présenté comme le frère qui n’a pas de cerveau, par opposition à Scar).
De plus, c’est un dirigeant oppressif et autoritaire.
Prosternez-vous et laissez-vous bouffer, BANDE DE GUEUX !
Le règne de Mufasa est baigné de monarchie de droit divin. Le film, de manière générale, transpire les valeurs chrétiennes traditionnelles, avec son baptême, son divin enfant, son prêtre et ses faisceaux de lumière qui tombent du ciel. Non, n’essayez même pas, le baptême Simba est un baptême chrétien, avec ablution et compagnie. Bon, après tout, un décorum catho dans un Disney, n’en faisons pas un fromage. L’une des références assumée est de toute façon la Bible.
Plus grave : le Roi Lion justifie une organisation en classes sociales qui serait naturellement légitime. C’est le cycle de la vie, voyez-vous ? Le discours de Mufasa à Simba est ahurissant à ce niveau-là. D’autant que, comme ce sont des animaux, les herbivores ne sont pas juste des sujets, ce sont des sujets QUI SE FONT BOUFFER par leurs supérieurs hiérarchiques, et c’est NORMAL, puisque c’est comme ça que le monde est sensé tourner. Si là y’a pas de la grosse légitimation d’oppression et d’exploitation !
C’en est presque drôle tant les arguments de Mufasa rappellent un zélote libéral possédé expliquant la théorie du ruissellement par une douteuse métaphore : ok les lions mangent leurs sujets, mais après, quand ils meurent, ils deviennent de l’herbe, et les herbivores les mangent ! Avec deux sous de jugeotes, c’est ridicule : formulé ainsi, il donne l’impression que le dominant est celui qui permet aux dominés de manger, alors qu’après en avoir dévoré 450 au cours de sa vie il fournit un minable carré de verdure… et oublie que ce ne sont pas que les rares corps des lions qui fertilisent le sol mais ceux de tous ! Je vous laisse faire les parallèles qui vous sembleront opportuns.
Alors vous allez me dire que c’est moi qui en fait une métaphore sociale. Sauf que non : c’est le film qui tourne autour de la légitimité du pouvoir et de l’ordre social à préserver.
« Mais tu sais les lionnes sont vraiment des rennes »
(ça tombe bien c’est Noël)
L’exploitation et l’oppression de classe légitimées, pas de soucis ! Quand on se dit que, dans ce cas de figure, ces classes dépendent de la race de l’animal, on est sur un terrain trèèès glissant. Attention : loin de moi l’idée de dire que tout cela est volontaire de la part de Disney ou que cela correspond à une volonté calculée de propagande idéologique. Ce n’est ni vrai, ni le propos. Mais ça n’empêche pas la critique de ce qui est au final dans le film, indépendamment des intentions.
Par exemple les lionnes.
Ce gros maquereau de Mufasa avec son harem. Pas de problème.
Putain les lionnes…
Là, le sexisme de Blanche Neige peut sérieusement aller se rhabiller. Et pour le coup, Disney a fait le choix douteux de coller au mode de vie des lions réels. Ce sont les femelles qui chassent et qui font tout le boulot, comme en vrai. Et il y a plein de lionnes pour un seul lion comme en vrai (en fait deux, avec Scar, mais qui est « à part », ne se reproduit pas et n’a pas d’autorité sur elles). Ainsi Mufasa, en bon vieux polygame, se trimballe-t-il avec son harem de femmes soumises qui chassent pour lui, sans que cela choque personne. On peut d’ailleurs en déduire que Simba et Nala sont demi-frères et sœurs. Je vous laisse seuls juges (non Pumba, pas devant les enfants).
Hakuna Matata « Tu m’as oublié Simba. En oubliant qui tu étais. »
Mais heureusement Timon et Pumba sont là pour nous sortir de ce carcan réac’ en offrant un mode de vie alternatif : un monde sans classes où l’on ne se bouffe pas les uns les autres, une vie de bohème sans autorité, un endroit où l’on peut être qui l’on veut sans se soucier de l’hérédité et des devoirs imposés.
Hakuna Matata. Mais quelle phrase magnifique…
Sauf que non ! Puisque cette contre-proposition restera lettre morte et n’est là que pour symboliser l’adolescence du personnage. Eh oui, l’adolescence, ce moment d’insouciance et de gentille rébellion face au système, à la famille et aux vieilles valeurs, où on se fait des super potes avec qui glandouiller. Un moment qui n’est que ça, un passage obligé qui ne doit durer qu’avant l’âge adulte. Car Nala va venir rappeler à Simba ses devoirs (qui consistent en gros à reprendre sa place dans la société, devenir responsable comme papa et lui faire des mioches… à elle, pas à papa, elle c’est juste sa demi-soeur).
Hakuna Matata, c’est cette partie du film qui admet que ouais, il faut que jeunesse se passe, et qu’on peut être un hyppie à crinière longue qui écoute du Tryo en fumant des insectes avec ses potes. Mais ce credo qui a marqué les esprits n’est surtout pas un projet de société viable, à tel point que même Timon et Pumba le mettront de côté pour prendre leurs responsabilités et accompagner Simba (qui d’ailleurs se fait engueuler par son père fantôme, comme tout ado qui se respecte).
Je dois avouer un truc un peu honteux : je trouve que la chanson
L’Amour Brille sous les Étoiles est super belle.
Et j’aime bien Elton John en fait. Quant aux films de gladiateurs, et bien…
Scar : « Rebelle et lion font rébellion »
Le plus étonnant, c’est qu’en allant consciemment sur le terrain du pouvoir, le film fait une critique du fascisme au travers du personnage de Scar.
Scar.
Sans doute un des meilleurs méchants de Disney. Déjà parce que tout est réussi dans sa représentation : son attitude, ses déplacements et la voix française exceptionnelle de Jean Piat. Sa nette intelligence face à sa brute de frère, son côté irrévérencieux, sa pédanterie jouissive. Mais surtout, la réalité de sa méchanceté.
Contrairement à beaucoup de vilains pas beaux, Scar ne fait pas semblant d’être mauvais. Ce mec cherche efficacement à buter son frère et son neveu encore gamin. Et puis pas avec le dos de la cuillère comme un putschiste nanar de mauvais films eighties : si Scar explique sa machination au gentil, c’est juste pour voir son regard avant de le tuer (avec succès). Simba vient de perdre son père ? Allons immédiatement le faire culpabiliser avant de lui jeter les hyènes au cul pour le dépecer. Scar est un vrai salopard qui n’a qu’un défaut : son règne. Dès qu’il a le pouvoir, ne reste de cette infâme crevure qu’une diva puérile sans projet (ce qui est étonnant pour quelqu’un de son intelligence) uniquement animé par son ego. Dommage.
Le Roi Lion oppose un pouvoir légitime à la tyrannie. L’allégorie totalitaire de Scar est très marquée dans Soyez Prêtes où les hyènes se mettent à défiler en ordre militaire dans un visuel clairement emprunté aux régimes fascistes (elles changent d’ailleurs subitement de design). Allégorie assez réussie dans l’utilisation par Scar d’un sentiment de revanche et d’injustice parmi les hyènes pour s’en faire des légions à ses ordres, promettant en bon populiste de les sortir de la misère si elles l’aident à asseoir son autorité par la force (une exploitation de stupidité et de haine qui a fait historiquement ses preuves).
Si vous regardez attentivement cette image, vous pourrez repérer de subtils éléments d’esthétique fasciste.
Ainsi, le régime de Mufasa est présenté comme naturellement juste (ce qu’il n’est pas) et légitime, à l’inverse de celui de son frère. D’ailleurs, les herbivores quittent le règne de Scar et reviennent pour celui de Simba, une société d’exploitation acceptée. On pourrait aussi discuter le sens de présenter comme fascisant toute forme de rébellion, de sédition, bref de remise en cause de l’ordre établi, d’autant qu’elle est nourrie par une injustice criante : le statut des hyènes.
Et puisque le film est déjà sur un terrain glissant depuis plusieurs kilomètres, partons définitivement en aquaplanning incontrôlable avec la problématique de ces chères ricaneuses.
Là où y’a de la hyène, y’a pas de plaisir : « Regardez-vous. Pas étonnant qu’on se balance au bout de la chaîne alimentaire. »
Le rôle des hyènes est le pire exemple de ce qui daube à mort dans Le Roi Lion, que ce soit réfléchi ou non par ses créateurs.
Que sont-elles ?
Les hyènes vivent en-dehors du royaume de Mufasa, qui les en exclut, dans une terre morte et hostile où elles crèvent la dalle. Elles posent un problème de sécurité car elles viennent chasser sur les terres du royaume (ce qui se comprend, vu qu’elles n’ont pas à manger en-dehors).
Déjà, cette représentation fait s’écrouler tout le discours sur le cycle de la vie, même pris au sens d’écosystème. Si toute chose a sa place dans le cycle de la vie, pourquoi pas les hyènes ? Dans la réalité, elles font partie, comme les lions, de l’équilibre naturel, mais ici elles sont des parasites.
La raison de leur exclusion n’est d’ailleurs pas très claire. Elles mangent trop ? Elles sont méchantes ? Elles ne reconnaissent pas l’autorité des lions ? Elles crèvent de faim dans les terres qu’on leur laisse mais tant pis, c’est la seule possibilité ? On ne peut pas accueillir toute la misère du monde ?
« Bonne idée ! On vivra sans roi !
♪ Sans roi ! Sans roi ! Lalala lala ! ♪ »
Voilà, c’était les 3 secondes de lucidité politique des hyènes dans le film.
Curieusement, cette idée ne reviendra pas sur le tapis.
Que Disney l’ait pensé comme ça ou non, les hyènes ont dans Le Roi Lion le rôle d’une race étrangère mauvaise, mal éduquée et impossible à intégrer, qui passe illégalement les frontières des lions pour venir voler leur pain et leur saucisson (NEZPAAAS ?!?) Et ça, excusez-moi, c’est le bruit des bottes et l’odeur de souffre, certes très présent dans l’air rance du temps, mais dont on peut se demander si c’est ce qu’il faut montrer à des enfants pour qu’ils comprennent le monde.
Pour Noël, on vous invite chaudement à vous taper un petit trip nostalgique en regardant Le Roi Lion – ou n’importe lequel de ces chefs-d’œuvre qui ont bercé notre enfance. L’occasion de refaire l’expérience du génie qui anime parfois ce grand cinéma de divertissement pour les petits et les grands enfants. L’occasion aussi de porter un regard nouveau sur le fond parfois douteux de ces fondamentaux et se faire une petite cure d’esprit critique en chantonnant. Après tout, si ces films ont contribué à notre vision du monde, il est bon de constater qu’on a pu les dépasser et que nos sociétés ont évolué. Ce sera aussi l’occasion de voir comment d’autres œuvres leur ont fourni un magnifique contrepoint – Le Bossu de Notre-Dame, pour citer un autre Disney, bien plus riche à expérimenter adulte qu’enfant, ou les Pixar qui s’échinent à démonter des décennies de valeurs faisandées.
Ca ne peut pas être pire que sa version live action… (c’était facile)
Cet article me rappelle une phrase de feu Jacques Chirac: « Là on est entrain d’enculer une mouche qui n’a rien demandé. »
Critique d’enfant pourri-gâté qui baigne maintenant dans le boboïsme contemporain, soit l’anti raci-fachi-nazi-hétéro-blanco primaire. Dommage, mais plus grand monde n’y croit. ;-)
Ping : LE ROI LION — LE GRANITÉ DE PAPAYE DE SCAR – Les pop corn
Juste un truc… Le Roi Lion est un film qui explique de manière très véridique la vie des lions. Et si les hyènes sont mis en dehors de la terre des lions c’est parce que dans la réalité, les lions ont pour principales ennemis/concurrents les hyènes tachetées (celles ci donc) et ils ne cohabitent pas.
Il aurait été donc faux de les mettre vivant ensemble avec des lions.
Par contre, je ne comprends pas pourquoi ont les allie à Scar
le 21/12/2014 ! :)
Salut,
désolée si la réponse à la question suivante est d’une évidence telle que je peux la trouver par mes propres moyens, mais je ne l’ai pas vue;
Donc, de quand date cet article s’il vous plaît? Parce que je viens de voir ce film aujourd’hui seulement, de mes yeux de jeune adulte, et ce pavé retranscrit à peu près ma vision du film.
tronc maléfique
C’est intéressant ce que tu dis sur la symbolique de la fin (et c’est peut-être voulu de la part de Disney) mais ça reste en contradiction avec le reste du film : le royaume revient à un statu quo (il est identique à celui de Mufasa) basé sur une hiérarchie de classe/race. Multi-ethnique mais très sélectif (les hyènes sont toujours des ennemis qui retournent chez eux crever la dalle, les herbivores de la bidoche servile). Et les personnages ayant une vision différente (Timon et Pumba) rejoignent Simba au détriment de leur vision du monde (pas de la sienne, ils rejoignent les rangs).
Il est très important d’exercer ses capacités d’interprétation pour bien juger un film, c’est-à-dire voir au-delà de la scène de fin et tenter de comprendre ce que celle-ci apporte.
En l’occurrence, on voit Simba devenir roi, son visage est plus doux, moins prétentieux que celui de son père, il est accompagné de Timon et Pumba (ses nouveaux conseillers amenant un autre regard sur la place des « petits »?), et ils sont tous à côté de Rafiki plutôt que de rester en retrait comme Mufasa, ce qui symbolise plus la célébration du groupe multi-ethnique et social que du fils divin.
Je n’ai pas vu Le Roi Lion 2 et je m’en fiche, mais la fin du 1 semble vraiment insinuer que le royaume de Simba – qui a plus d’expérience sociale que son père – sera plus juste, et que chaque passage de génération sème quelques graines de progrès.
Alors comme je l’écris, y’a en effet une certaine justesse dans la représentation (et dénonciation) du fascisme via Scar (qui est en plus très appuyée symboliquement) : c’est un dominant, un oppresseur, mais il « monte » des parias contre un autre dominant (plus modéré, plus classique).
Cependant, les herbivores, pour moi, représentent mal les classes moyennes, parce qu’il manquerait des pans entiers de la population, notamment les prolos plus classiques ou les paysans. Ici, les herbivores sont l’ensemble des sujets (en-dehors il n’y a que les exclus OU les dominants). Et c’est là où le film est douteux : ils acceptent d’être bouffés (littéralement) par un régime parce qu’il est légitime et juste (on ne sait pas trop en quoi), mais pas par Scar.
On notera d’ailleurs que Scar est la seule alternative au régime de Mufasa (à l’exception de Timon et Pumba, qui finissent par le rejoindre) et que donc le film associe toute alternative au fascisme (aucun herbivore n’a de problème avec le fait d’être bouffé putain ?).
Je précise là encore que je ne prétends pas que ce soit volontairement exprimé par les auteurs mais que c’est, au final, ce qui est dans le film.
Merci et c’est juste ce que tu dis sur l’anthropomorphisme.
En effet mais le problème c’est d’aller sur le terrain de l’organisation politique et de la légitimité tout en restant sur des systèmes de conte de fées.
Scar c’est un petit peu la Marine Le Pen du Roi Lion qui propose aux hyènes (parias de la société) de se débarrasser des classes politiques dominantes (UMP PS) représenté par Mufasa.
Puis quand Scar arrive au pouvoir, les herbivores (classes moyennes) se cassent, parce qu’ils ne veulent pas subir son régime faciste.
Un bon exemple de la limite de l’anthropomorphisme dans les Disney. Il a plein d’éléments qui du point de vue purement animal sont « logiques » mais qui à partir du moment où on insinue des comportements, réflexions et émotions typiquement humains deviennent plus que douteux moralement parlant.
Analyse bien écrite et construite en tout cas, un vrai plaisir à lire ;)
Bravo, Bolchegeek, pour cette excellente analyse !!! En même temps, comment insérer une transition démocratique alors qu’on est manifestement en pleine succession monarchique, genre XVIIè – XVIIIè siècle en France, avec complots, voire guerres, sans oublier la consanguinité bien connue des monarques de l’époque…